Gare à l’amour
Placée en fin d’album, Tes Yeux Noirs se fait plutôt remarquer, à l’époque. Nicola n’avait encore jamais livré de paroles si personnelles, et voilà que l’amour s’en mêle ! Le texte traite de la séparation dont il ressentait alors l’épée de Damoclès au-dessus de la tête. Mais la mélodie de Dominik est trop efficace pour ne pas sortir en single ! Canary Bay, 3ème Sexe, 3 Nuits par Semaine ont eu un immense succès, et Tes Yeux Noirs est appelé à être le quatrième hit d’un album toujours au sommet des chiffres de ventes et de diffusions radio. Nous sommes fin 1985, et l’indomania bat son plein. Les grands du star-system y prêtent attention et parmi eux, un certain Serge Gainsbourg. Totalement emballé par la créativité du groupe, il propose de concevoir le clip de Tes Yeux Noirs…
L’esthétisme visuel du clip, c’est du pur Gainsbourg. Image sombre et fumante, figures mouvantes dans un décor à mi-chemin entre le fantasme et la réalité. On se retrouve on ne sait comment au beau milieu de la nuit dans une gare SNCF sertie de têtes blondes qui saluent presque amoureusement le groupe. Et la figure de proue, c’est Héléna Noguerra, belle, pulpeuse, qui danse inlassablement, tandis que les membres du groupe jouent autour d’elle, répartis sur un grand échafaudage installé dans la gare susnommée. Nicola détestera ce clip, qui ne correspond pas à l’idée initiée par la chanson, et en veut encore aujourd’hui à son auteur ! Certes c’est un clip un peu hasardeux, voire kitsch, mais après tout n’est-ce pas le cas des autres clips d’Indo des années 80 ? Et puis le temps aidant, la touche Gainsbourg vaut à cette vidéo un certain charme et une série d’anecdotes que l’Histoire n’est pas près d’oublier.
Pour une première « chanson d’amour », c’est une expérience réussie, tant pour la qualité de la chanson que pour l’immense succès public qu’elle a rencontré. Ce slow indochinois est un standard des ondes radiophoniques qui diffusent encore largement le titre de nos jours. Il est également un passage régulier des concerts dont Nicola profite généralement pour cultiver le lien du public à son groupe, et plusieurs versions acoustiques fleuriront à l’occasion, comme pour la compilation Urgence en 1992 ou pour la promotion des Nuits Intimes. Il faut dire que les paroles coulent de source, et la mélodie est imparable, romantique sans être niaise ; les couplets/refrains s’enchaînent avec une parfaite énergie. C’est surtout vrai pour l’édition 45 tours (et Maxi), qui offre un nouveau mixage enrichi d’un nouveau souffle par rapport à la version de l’album.

Les faces B ne sont pas les mêmes selon les 45 tours. On retrouve Hors-La-Loi sur le standard et Monte Cristo sur le Maxi. Ces deux titres ont par contre tous les deux été remixés et rallongés, ce qui est toujours un plus à l’écoute. Les différents pressages de Tes Yeux Noirs comportent des fautes selon les pays d’édition, ainsi l’on peut lire « Les Yeux Noirs » sur certains 45 tours allemands, ou pire, « Tes Yeux Notrs » !
A noter qu’il existe un superbe Picture Disc du Maxi 45 tours, où l’image de la pochette est directement imprimée sur les faces du vinyle.

Ce titre est avec « More » pour moi l’un des plus beaux morceaux d’Indochine. Il y a comme une forme de mélancolie insondable qui serre à chaque écoute le cœur. Acheté à sa sortie, » Tes Yeux Noirs » a pour moi le parfum de l’enfance et celui des souvenirs heureux. Plus de trente ans après, c’est toujours un bonheur que d’y retourner. Et c’est vrai, la version maxi 45 tours avec cette intro frisson est juste superbe.
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Fin d’une année scolaire, la dernière dans un collège que je ne chérissais guère. Fin juin 1986, chez un oncle abonné à Canal +, le Top 50 recevait en sa 29ème place, ce troisième extrait de l’album 3 d’Indochine. Le 45 tours était déjà acheté.
« Tes Yeux Noirs » réveille un de ces souvenirs chauds comme tant d’autres où l’on aimerait quelquefois se blottir au cœur de l’hiver. Le souvenir d’un premier amour pré-lycéen que l’on perdra de vue au début de l’été, les grandes vacances s’ancrant dans les cœurs et ralentissant le temps, les mois estivaux paraissant parfois des ans. Le temps de savourer les disques qu’on écoutait et de rêver, d’imaginer la muse collégienne danser en lieu et place d’Héléna Noguerra dans le clip réalisé par Serge Gainsbourg. Et Dimitri de conclure en insufflant une caresse de son saxophone, annonçant que la fin approche.
« Tes Yeux Noirs » est sans hésiter l’une des plus belles chansons d’Indochine, chaude comme un baiser, un baiser d’au-revoir, un baiser d’adieu.
La face B, « Monte-Cristo », par contre j’aimais beaucoup moins.
PS : La coupe de cheveux de Nicolas Sirkis (photo), non là, c’est pas possible !
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