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2002 et 2003 sont deux années intenses pour Indochine, très intenses, tenues dans un crescendo que rien ne semble pouvoir arrêter. Pour présenter l’album Paradize, un concert-prélude est d’abord programmé à l’Elysée-Montmartre (« Bonsoir, nous sommes le groupe Indochine »), puis le groupe part sur les routes de l’Acte I du Paradize Tour où s’enchaînent des live toujours plus rock’n’roll. Entre-temps, le single J’ai Demandé à la Lune est un immense carton, plus d’un million d’exemplaires vendus, et l’effet est sans appel : Paradize se vend comme des petits pains et les tickets de concerts en font autant, remplissant une à une toutes les salles de France au cours de l’acte II. 2002 sera l’année des concerts, 2003 celle des prix (NRJ Music Awards, Victoires de la Musique,…) tandis que le groupe repart pour un acte III toujours plus couronné de succès. Puis vient l’étape finale, le 3 juin 2003 à Bercy, où les fans anciens comme nouveaux vont venir sceller ce renouveau du destin.

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La vidéo comme l’audio rendent compte de l’immense impact qu’a pu avoir ce concert final sur le groupe et sur son public. Il sonne comme un avant-goût de paradis, là dans cette bulle où chacun se retrouve et vit pleinement, même l’espace de quelques heures. Tout devient jubilatoire et excitant dans cet univers à la fois ouvert et fermé, tout de noir et de rouge, cerné de toutes parts sous l’étendard de Paradize et sa croix de ralliement. C’est l’ultime récompense, pour le groupe dont le travail acharné se voit enfin considéré quand 17’000 mains d’un public conquis se lèvent pour le remercier.

Bercy, donc. Passons sur le fait qu’Indochine ait été le premier groupe français à le remplir, tout ça on le sait, pour s’intéresser au contenu du concert. Techniquement, c’est une date comme une autre du Paradize Tour, qui ne pouvait de toute manière pas être beaucoup plus copieux que les concerts en zénith déjà longs de 2h30 de show. Donc nous avons bien là le témoin authentique de l’aura messianique des concerts de l’époque. Du reste les premières minutes du DVD laisse une idée concrète à ce sujet avec le témoignage de quelques fans attendant dans le parc de Bercy. L’on voit ensuite la salle se remplir, dominée par une musique d’attente vibrante qui s’évanouit avec les lumières chaudes pour introduire l’érotique Venus. Cette intro met la salle parfaitement en condition, laissant la bulle lentement se refermer pour emmener le public dans l’univers indochinois durant les deux heures à venir. Vénus éclot peu à peu, Nicola arrive pour entonner le premier couplet puis la guitare de Boris transcende la mélodie avec merveille dans un refrain musclé. Frissons garantis ! Ce n’est encore que le début d’un pur moment rock avant que s’enchaînent Paradize, Electrastar, 3 Nuits par Semaine, Punker et Astroboy. Un quinté qui déménage et nous emmène dans cette folie d’un soir grâce à la qualité de la captation, immersive et délectable.

Après Mao Boy et Popstitute viennent les morceaux au caractère plus religieux, plus propres à l’émotion qui caractérisent Indochine depuis quelques années et se confirmeront encore davantage par la suite (Dark, Le Grand Secret en présence de Melissa, J’ai Demandé à la Lune,…). L’iconique Punishment Park relève la poussière puis la première partie du concert s’achève sur un medley, idée inspirée par le Dancetaria Tour. La seconde partie de cette soirée mythique se pare d’un set acoustique, idée cette fois inspirée de la tournée des Nuits Intimes (Salômbo, La Colline des Roses,…) suivi de deux titres en piano-voix (Anne et Moi et Tes Yeux Noirs), où l’émotion devient palpable et jamais ne rompt tant le piano et le chant de Nicola entrent en harmonie. Mais ce mémorable instant finit par prendre fin et une intro martelante annonce le retour de l’orchestre : une version très rock de 3ème Sexe ramène les guitares électriques aux offices, et ce n’est encore qu’un échauffement à côté de la chanson suivante, la rugissante Marilyn ! Cette chanson donne naturellement un effet live sans précédent, au point de rajouter un refrain aux paroles légèrement modifiées… Ensuite vient cette intro qu’on ne présente plus, où le temps semble s’être suspendu pendant que la lumière inonde progressivement la salle et perce le corps christique de Nicola. L’Aventurier raconte vingt ans d’Indochine et gagne à l’occasion de ce concert son statut de hit indétrônable. Passé la fédératrice Dunkerque et l’instrumental ravageur Glory Hole, le groupe s’en va mais Nicola revient pour une dernière chanson, et il n’y en a qu’une qui pouvait être jouée, ainsi en fin de concert du Paradize Tour : Un Singe en Hiver, bilan biographique d’un artiste accompli. Cette piste est cachée sur le CD à la fin de Glory Hole.

Après Bercy, Nicola créera le X-Festival, avec des groupes de rock indépendants emmenés par Indochine dans un festival européen itinérant. Et lors de la sortie du DVD en 2004, le groupe relèvera le pari de faire deux concerts la même journée, à l’Ancienne Belgique de Bruxelles puis au Grand Rex à Paris. Et enfin, un bref retour se fait à Bercy le mois suivant, à l’occasion de l’Europe 2 live avec d’autres groupes jouant sur scène. Sacré destin, pour un groupe définitivement revenu en grâce.

Le double CD, baptisé 3.6.3 (3 juin 2003), sort en édition standard et en digipack limité, avec un DVD bonus regroupant quelques images du show. Le DVD intégral ne sort que deux mois après, également en standard et limité par le biais d’un digipack de quatre volets et 3 DVD pour un total de plus de 6 heures de vidéo (photo des digipack déballés ici) ! La galette bonus comprend des images des coulisses de la tournée et six titres en live enregistrés au zénith de Paris le 15 et 16 novembre 2002.

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Editions digipack