Le rock ne meurt jamais

De Black City Parade à 13 subsiste aujourd’hui l’intervalle le plus long entre deux albums d’Indochine. Les fans auront dû attendre quatre ans et sept mois pour découvrir de nouveaux titres (moins pour La Vie est Belle) mais pour autant le silence n’a pas forcément été le plus long, et pour cause cet espace aura bien été chargé en concerts et événements divers ! Le but de cette chronique un peu spéciale est de revenir sur principalement deux tournées qui ont occupé cet espace, celles qui n’étaient pas attendues après un Black City Tour déjà riche en rendez-vous. C’est encore là qu’Indochine se sent le mieux, comme il l’a toujours été. Sur scène et à la faveur d’un public qui répond toujours à l’appel, le groupe se risque cette fois à ajouter une dimension supplémentaire en visant au delà des frontières !

Carte
Voilà le programme !

L’Europe City Club Tour, ce sont huit dates à travers l’Europe dans de petites salles (500 personnes) annoncées pour avril 2015 ! Le groupe sort alors du Black City Tour et l’on pensait que le groupe avait bien achevé sa tournée, en ce soir triomphal du 9 août 2014 à la Foire aux Vins de Colmar. C’est oublier que le groupe a pris l’habitude depuis quelques albums d’organiser une tournée des clubs, ces petites salles qui réunissent les plus chevronnés des fans ainsi que les plus chanceux, car bien sûr les places sont rares. Mais cette fois les clubs seront hors de France, tous sans exception, ce qui est totalement inédit ! L’idée est plus que judicieuse d’autant qu’elle s’accorde avec le concept de l’album : c’est en traversant les villes de part et d’autres du monde que l’idée de Black City Parade est venue, c’est en les retraversant que son ère se terminera. Dans l’élan de cette initiative Indochine avait mis en ligne des versions différentes des titres de Black City Parade, en anglais, en italien, en espagnol… une façon de teaser comme une autre cette tournée brève mais internationale. L’idée a déjà été expérimentée avec une date anticipée à Londres le 14 juillet 2014 au Sheperd’s Bush Empire, et la réussite du projet semble avoir été le feu vert pour ce nouveau défi. Un défi, oui, car si le succès d’Indo est certain dans les pays francophones ce n’est pas toujours un pari gagné d’avance pour les autres, et c’est donc dans le noir qu’Indochine annonce le 28 janvier cette série de concerts passant par Barcelone, Berlin et Amsterdam entre autres !

Maintenant que la chronologie a été restituée, alors quid de ces concerts ? A l’instar des précédentes tournées des clubs, ces lives rallument immédiatement la flamme du Black City Tour mais avec son lot de nouveautés. Ainsi le groupe ne déboule plus sur scène avec BCP ni avec Electrastar, mais sur un Dancetaria gonflé aux hormones (qui ouvrait aussi les concerts du Meteor Club Tour 2011) ! La suite est plus classique mais rappelle les bons souvenirs de l’imposant Black City Tour (dont le support live est sorti quatre mois plus tôt) avec Salomé, Traffic Girl, College Boy et même Europane ou le Dernier Bal qui avait disparu des setlists. Après l’implacable Black City Club deux titres acoustiques résonnent dans l’enceinte de l’Apolo : Dunkerque et le retour de Kao Bang ! La date de Barcelone, c’est aussi la surprise de voir que le line up a subi quelques changements : Shoes et Matu, respectivement le batteur et le claviériste du groupe depuis dix ans, ne sont plus là ! C’est le Suédois Ludwig Dahlberg qui reprend les baguettes de Shoes, tandis que la tâche de Matu ne sera la charge d’aucun remplaçant si ce n’est Oli pour les parties piano. Une nouvelle perturbante d’autant que la nouvelle avait bien été gardée, et à défaut de détails nous ne nous contenterons que de la parole de Nicola : « Comme vous l’avez vu on a traversé une crise majeure, mais on repart de plus fort! » scande t-il pendant le concert. Il est vrai que le groupe a connu de nombreux remaniements mais la stabilité affichée du groupe depuis Alice & June nous avait semblé acquise. Quoi qu’il en soit l’Europe City Club Tour effectue son périple de deux semaines avec un enthousiasme renouvelé, sans doute nécessaire après la crise, et remet du baume au cœur du groupe. D’autres titres reviendront après une plus ou moins longue absence, comme Punishment Park à Milan et ô surprise, le retour insensé de Leila à Stockholm ! Il faut dire que les Suédois attendaient le retour du groupe depuis trente ans sur la terre des Vikings ! Le public est d’ailleurs bien présent, français, expatriés ou non côtoient les Européens dans ces messes d’un autre genre qui unit toutes les couleurs à la cause Indochine. Les souvenirs de cette tournée exceptionnelle sont archivés dans un documentaire baptisé Road Tour Film.

Applause
Clap de fin à Paradiso Noord

Le silence revient et on pense alors ne plus revoir le groupe tant que le nouvel album devient le cœur de ses préoccupations. Un simple acte de présence au concert TIDAL de New York le 20 octobre remet brièvement Indochine sur scène, peut-être un peu malgré eux quand on voit la prestation du show où le public du rappeur Jay-Z ne s’attendait pas à voir un groupe de rock français fouler leurs terres ! TIDAL sera de toute façon un naufrage commercial. On en aura tout de même apprécié l’utilité lorsque RTL2 annonce un de ses « concerts très très privés » dédié à Indo, le deuxième après un premier volet en 2013, qui aura lieu cette fois au Trianon le 9 décembre 2015 afin de promouvoir la sortie du live Black City Concerts. TIDAL offre alors à tous les internautes la possibilité de visionner le live en direct ! Ce set isolé célèbre en outre les dix ans d’Alice & June en jouant pas moins de huit titres du double album, dont Ceremonia en entrée de setlist. Ce concert intervient alors dans un climat très spécial puisque l’actualité est saignée par le terrorisme et tout le monde a encore en tête le massacre du Bataclan du 13 novembre dernier. Face à la semence de la mort de la destruction née de la folie des hommes, Indochine décide de célébrer la vie à travers la musique et c’est avec ceci à l’esprit que Nicola et Oli entreprennent un émouvant piano/voix sur Le Baiser et The Lovers en milieu de set. Au delà de l’hommage constitué ce soir là Indo veut voir les cœurs continuer de battre alors contrairement à leurs plans initiaux (l’année 2016 devait être exempte de scène pour se concentrer sur le treizième album), une nouvelle série de concerts est annoncée pour l’été…

Affiche Festivals Tour 2016
Première photo officielle pour Ludwig

Changement de décor pour le Festivals Tour 2016 ! Le groupe s’échappe des petites salles pour revenir sous le ciel lunaire des concerts en plein air, chauds comme la braise pour ne pas dire caniculaire aux dates les plus chaudes de l’été ! Le premier des sept festivals concernés, les Papillons de Nuits en Normandie, demeure encore à l’aube de l’été et c’est dans le printemps français que le groupe revient distribuer son énergie communicante, le 20 mai 2016. Le morceau d’intro, Bad Radio de Leftfield, est étonnant pour du Indochine. C’est une musique typée house alternative sur laquelle Oli et Ludwig posent leur touche, les deux musiciens étant les premiers à entrer sur scène avant d’être rejoints par le reste de la bande sur les nappes synthétiques lumineuses du Baiser. Ouverture comme toujours riche en émotion et pour ne rien laisser au hasard, c’est un hommage à David Bowie mort en début d’année que le groupe souhaite rendre en réinterprétant Heroes. A noter qu’Indo avait déjà repris cette chanson sur la tournée de Dancetaria. Quant à la suite, c’est une déferlante de valeurs sûres qui composent cette « setlist de combat » tels que Marilyn, Alice & June et le retour de Punker après une absence totale sur le Black City Tour. Certaines intros sont d’ailleurs inédites (dont celle de L’Aventurier, renouvelée depuis le BCT) mais l’essence est bien là, et celle d’Alice & June continue de hanter la setlist avec Adora et Gang Bang pour porter les couleurs de l’album autant que pour dynamiser ces lives de plein air. J’ai Demandé à la Lune prend d’ailleurs sens sous la pleine lune de ce soir normand. Petite surprise fort agréable de ces sept dates, le Black City Club invite Astroboy dans son set à la place de Play Boy, ce qui offre un changement rafraîchissant après un medley inchangé depuis 2014. D’autres titres s’interchangeront au fil des festivals traversés par Indo, comme Le Fond de l’Air est Rouge remplaçant Le Lac (avec les images du clip live diffusées sur les draps blancs entourant la scène) ou Salomé qui ouvre certains sets à la place du Baiser. A noter que la nouvelle attaque terroriste frappant Nice de plein fouet la veille du concert à Carcassonne amènera Nicola et le maire à adresser un mot aux victimes, suivi d’une minute de silence en lieu et place du morceau d’intro. Certes ça casse l’ambiance mais c’est là un digne respect pour les victimes. La musique est une expression de la vie en toutes circonstances, et plus encore dans ces moments là. Le concert n’en a été que plus intense, porté par une énergie formidable où chacun a sauté et dansé de bout en bout du live. Il en demeurera un souvenir de nervosité, de désinvolture et de célébrations rassemblant les passionnés de musique dans la chaleur des nuits enfiévrées.

Le Cabaret Vert sera le dernier concert de cette série. Désormais bien requinqués, les membres enrichis de la fraîcheur apportée par Ludwig et d’un nouveau souffle repartent en studio et n’en bougeront cette fois plus… Rendez-vous en 2017 !