House of the rising Bob
La chanson la plus emblématique d’Indochine.
Et aussi son premier grand succès, celui qui a tutoyé les cieux du hit-parade au cours de l’été 1983. Pouvait-on se figurer, à l’époque, que le récit chaotique d’un héros de BD presque inconnu puisse se hisser devant Thriller de Mickael Jackson et Let’s Dance de David Bowie ? Nicola ne s’en doutait pas lui-même, quand de son séjour en Belgique il emprunte un livre au hasard dans la bibliothèque et tombe sur les pérégrinations d’un certain Bob Morane. Tout en spontanéité, il prend au hasard les titres des albums, les lieux, les personnages, les assemblant éhontément dans un texte disloqué qu’il écrit dans sa chambre. Puis il pose ces paroles sur la mélodie de Dominik, qui forment un tout convaincant dont le groupe effectue un premier jet sans le refrain au Rose Bonbon l’automne 1981. Un an plus tard, la chanson est mixée sur le premier EP du groupe, puis le 45 tours déferlera sur la France l’année suivante encore (janvier 83). Son succès hisse le groupe à la notoriété et demeure aujourd’hui le plus gros fer de lance de tous ses concerts.
L’Aventurier, c’est d’abord un riff de guitare qui n’a pas pris une ride depuis sa création. Dominik Nicolas a le talent que l’on sait mais pour composer un tel morceau, il faut aussi cet état de grâce, cette main divine qui crée la légende. Aujourd’hui encore, ces touches de synthé, ces nappes aériennes et cette guitare aguicheuse fonctionnent du feu de Dieu, entraînent le public de part et d’autres de la France (et pas seulement) sur les pistes de danse et glorifient les concerts d’Indochine dans un final qui met toujours tout le monde d’accord. Comment une telle efficacité a-t-elle pu se mettre en place et perdurer ? L’Aventurier doit beaucoup à sa musique dont personne n’a jamais nié la qualité. La mélodie est imparable, bien agencée entre des phrases rythmiques qui rebondissent les unes sur les autres, et la frénésie du titre est telle que le refrain, les couplets et les ponts soutiennent une énergie qui jamais ne s’épuise. En somme, une véritable petite bombe new wave !
Comme dit plus haut, la musique forme un tout avec le texte. Celui-ci est un improbable fourre-tout, évoquant les périlleuses aventures d’un héros légendaire aux confins de l’Asie Sauvage à travers un assemblage de titres de BD. La mention aléatoire de personnages (Bill Ballantine, Civa,…), de lieux au parfum folklorique (La vallée infernale, Manicouagan,…), de mystères et de manœuvres louches (L’ombre jaune, l’opération Nadawieb,…) sont ainsi mis bout à bout et tant pis si le résultat ne veut rien dire : c’est du second degré assumé, né de tout et de rien, dont le seul sens à tirer est celui de se moquer du mythe du héros invincible. Une pure blague, une habile parodie, sous des allures de course héroïque à travers les dangers. C’était l’Indochine de l’époque, cette envie d’être en réaction avec ce qui faisait alors sous couvert de musique pop menée tambour battant. Le clip ultra-kitsch confirmera ces premiers pas sous l’égide de l’inconscience et de ce renouvellement pop qui n’appartiennent qu’à eux. L’histoire raconte qu’Henri Vernes contacta le groupe à la suite du succès de L’Aventurier, avec la requête précise d’apposer un macaron « La chanson de Bob Morane » sur les supports. Bien sûr le groupe refuse, peu enclin à laisser une telle annotation commerciale enlever tout le second degré du texte !

Indochine est né, a grandi, mûri et finira très certainement avec L’Aventurier. Avant même de se faire un nom dans le paysage musical français, le titre était déjà joué sur les scènes parisiennes, puis chaque tournée a maintenu ce hit absolu dans sa setlist malgré l’arrivage très réguliers de nouvelles chansons. Dans les années 80, elle sonne new wave, jouée en milieu de concert. Dans les années 90, elle contracte un look plus pop et soigne son arrivée avec une intro courte mais très suggestive. C’est surtout depuis Paradize qu’elle est devenue un immense hymne rock où chacune de ses apparitions déchaînent les passions, poussant le public comme le groupe à donner le meilleur d’eux-mêmes
Le 45 tours s’écoule à 500’000 exemplaires. C’est étonnamment moins que 3ème Sexe et La Lune, mais il fallait encore du temps à Indochine pour pérenniser son succès. Il existe trois éditions du 45 tours dont une néerlandaise et l’autre allemande, avec quelques légères différences d’impression. Enfin, rappelons que le titre a été découvert dans une version non finalisée sur certains pressages suédois de l’album, offrant une alternative moins calibrée radio avec une bande vocale plus naturelle, ce qui vaut le coup d’être entendu ! Pour soutenir la sortie d’Indo Live en 1997, un single promotionnel de L’Aventurier a été distribué à la presse avec deux autres extraits du concert.
Lorsque l’on a grandi dans les années 80, «L’Aventurier» était LE titre d’Indo. Comment ne pas succomber à ce riff légendaire de Dominik ? Quelle intelligence musicale de remettre au goût du jour le son des Shadows à la sauce new-wave ! Lorsque l’on écoute au casque ce titre, on se rend bien compte que tout est à sa place et que le travail sur les synthés est vraiment percutant et terriblement efficace. Concernant les paroles de Sirkis, je suis beaucoup plus sceptique. Je n’ai jamais trouvé dans les articles et interviews des années 80 une quelconque mention de second degré de sa part. J’ai toujours pensé en très habile artiste qu’il est qu’il avait inversé la situation en faisant d’un texte n’importe nawak et très souvent critiqué un brillant hit ironique. Ceci n’enlève en rien à l’efficacité de l’ensemble ceci étant mais affaiblit un peu la portée du propos.
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« N’importe quoi » ou « portnzwak »… mais n’importe nawak… même le rouquin Bill Balantine ne dirait pas ça 😃
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